Dissident, il va sans dire

De Michel Vinaver

Mise en scène: Philippe Jeanloz
Jeu: Hélène, la mère:
Kamila Mazzarello
Philippe, le fils:
Aitor Gosende
Le technicien de théâtre:
Philippe Jeanloz
Décor et accessoires: Antoinette Baira
Production: Théâtre Liquide

Michel Vinaver, de son vrai nom Grinberg (il est le père de l’actrice française Anouk Grinberg) est né en 1927 à Paris. Il débute en littérature avec deux romans, avant d’être embauché en 1953 par la société Gillette France. Il finira par en diriger le groupe, menant en parallèle une activité de cadre d’entreprise et d’écrivain.

Photo AFP

Il quittera Gillette en 1982 et deviendra professeur associé à l’Institut d’Études Théâtrales de Paris III, puis de Paris VIII jusqu’en 1991.

Son Théâtre complet, en huit volumes, a connu dès 2002 une nouvelle édition conjointe chez Actes Sud et L’Arche. En 2006, il a reçu le Grand Prix du Théâtre de l’Académie Française pour son œuvre. En 2009, il est entré au répertoire de la Comédie Française avec Une Vie ordinaire.

Dans la plupart de ses pièces, le dramaturge inscrit l’homme dans le champ économique, mêlant l’intime au social. C’est le cas de Dissident, il va sans dire.

Il y a plus de quarante ans, avec cette courte pièce, Michel Vinaver annonçait avec lucidité les évolutions de la société et leurs effets sur l’individu: le développement des familles monoparentales, le difficile passage de l’adolescence à la vie adulte dans un monde où, parce que le travail fait défaut, se développent de petits trafics…

Mère et fils habitent ensemble l’appartement, le père étant parti depuis longtemps: Hélène, employée de bureau, et Philippe, vingt-deux ans. Attachants, l’un et l’autre. Attachés, l’un à l’autre.

Lui passe son temps à se détacher d’elle, de la société, du monde. Dissident, il l’est avec inertie, loin du socialisme qu’affichent ses deux parents. Il parle mais se délie des paroles qu’il prononce. Il va; il va sans dire. Hélène, elle, n’est pas immobile; elle dit le discours “des parents”, parfois ardente, parfois discrète et hésitante; toujours délicate.

HÉLÈNE
Il est temps que tu te trouves une petite

PHILIPPE
Et toi un monsieur bien sous tous les rapports

HÉLÈNE
Quelquefois je me demande si tu es sérieux en disant ça et où tu en es avec les filles

PHILIPPE
Ou bien si je ne suis pas un homosexuel

HÉLÈNE
Tu ne me dis jamais rien

PHILIPPE
Je te dis tant de choses tout le temps

HÉLÈNE
Oui à moi de démêler

Avec un minimum de mots, exprimant à la fois complicité et communication tronquée, chacun évolue en adoptant des rôles variés. Face à l’autre; face à lui ou elle-même aussi. Pourtant, Hélène et Philippe ne formulent pas ce qui provoque ces changements. Vinaver ne propose pas d’analyse, il nous livre des fragments de situations sous la forme de 12 séquences temporelles séparées par une ellipse: au spectateur le soin d’imaginer et interpréter ce dont sont faits les jours, voire les semaines composant le “hors-scène”.

Dissident, il va sans dire constitue ce que Vinaver a nommé, en juillet 77, son «théâtre de chambre». Dans le lieu d’accueil qu’est Pôle Sud à Lausanne, le spectacle aura lieu chaque soir dans une salle différente. Le centre socio-culturel, géré conjointement par la Municipalité de la Ville et l’Union Syndicale Vaudoise, est abrité dans un vaste bâtiment du XIXe siècle au centre ville, dans le Flon. Pôle Sud accueille dans ses nombreuses salles des manifestations et activités proposant, toujours dans une démarche participative, l’éveil à la citoyenneté et la mise en question des idées reçues.

Les salles où se déroulera le spectacle sont de dimensions variées: local de répétition comprenant une scène au sous-sol; vaste espace muni d’un bar au rez; petite cafétéria au premier étage, etc. Dans un lieu à chaque fois différent, devant un public composé tantôt d’au maximum quinze ou quarante spectateurs, selon le soir de représentation, les deux comédiens auront à tenir – et inventer – la bonne distance de l’un à l’autre. Pas de coulisse non plus, ni de loge où enfiler un nouveau chandail ou se recoiffer: la frontière entre acteur et personnage sera ici perméable.

Comme en rappel de l’artifice théâtral, la mise en scène inclut la présence d’un troisième personnage joué par le metteur en scène lui-même: le technicien de théâtre. Celui-ci, au cours des entre-scènes, vient clore chaque scène par un “noir”, déplacer le mobilier et les accessoires.

Tout a lieu là, sur le plateau de théâtre. Corps, regards et même silences se répondent, s’attirent, se repoussent, rythment, rythment.

Kamila Mazzarello
Comédienne

Née en Pologne, elle joue d’abord dans son pays: la tradition de l’exploration théâtrale de la corporalité y marque son jeu. D’elle-même, Kamila dit: «Toujours en train de chercher… Qui? Quoi? Comment? Parfois, je trouve… je prends… Un temps, deux temps… je réalise, j’aime. Je mets des couleurs dans la vie.»

Aitor Gosende
Comédien

Né en 1989 à Lausanne, en parallèle à des études de lettres en français moderne, il suit un cours de théâtre à Lausanne avec Michel Sauser, Théâtre 2.21 et participe à des stages de théâtre avec Gustavo Giaccosa et Antonio Llaneza. En 2018, Aitor travaille pour le Théâtre Liquide en tant qu’assistant à la mise en scène de Pour toi, trouble cantique, d’après Marguerite Burnat-Provins. Il présente son mémoire de Maîtrise universitaire en français moderne, «Lire pour un autre», à propos de la lecture à haute voix au théâtre en janvier 2019. «Le corps, le corps», dit-il souvent à voix haute!

Philippe Jeanloz
Metteur en scène

Philippe Jeanloz invoque ses bons génies: Jolanda Rodio, au Kulturmühle de Lützelflüh, où il effectue sa formation; le danseur Kazuo Ohno, découvert au Théâtre pour le moment, avec lequel il collabore à Berne de 1981 à 1985; Dominique Meyer, avec qui, en 1986, à Lausanne, il fonde le Théâtre A. Comédien, animateur d’ateliers de travail théâtral, dramaturge, il est metteur en scène d’une vingtaine de spectacles.

Christian Moutinho
Photographe

Né en 1988, il obtient son Diplôme de Culture Générale option Artistique en 2006. Il entame ensuite une formation de graphiste qu’il interrompt avant de travailler à la Fnac. Passionné par la photographie, il se forme en autodidacte. Le Théâtre Liquide lui doit la plus ample part de ses archives visuelles en noir et blanc.

Antoinette Baira
Décors et accessoires

Passionnée d’arts appliqués et de communication visuelle, Antoinette Baira, née à Berne en 1957, œuvre en tant que costumière, accessoiriste ou décoratrice pour de nombreux chorégraphes, compagnies de danse, réalisateurs et metteurs en scène romands: Marie-Jane Otth, Reminox’s Danse, Francis Reusser, André Steiger, Philippe Jeanloz, Jean-Gabriel Chobaz.

Le spectacle a lieu chaque soir dans une salle différente de Pôle Sud:

mardi 4 juin, 20h30 (18 places)
mercredi 5 juin, 20h30 (14 places)
jeudi 6 juin, 20h30 (45 places)
mardi 11 juin, 20h30 (38 places)
mercredi 12 juin, 20h30 (18 places)
jeudi 13 juin, 20h30 (45 places)
vendredi 14 juin, 20h30 (14 places)
dimanche 16 juin, 17h (38 places)
mardi 18 juin, 20h30 (18 places)
mercredi 19 juin, 20h30 (16 places)
jeudi 20 juin, 20h30 (38 places)
dimanche 23 juin, 17 h (45 places)